Estelle Mogensen : « la physico-chimie des biomolécules : une discipline essentielle »
Interview d’Estelle Mogensen, enseignante en physico-chimie des biomolécules à Sup’Biotech
Depuis octobre 2009, Estelle Mogensen donne à Sup’Biotech un cours de physico-chimie des biomolécules en anglais aux 4e années et dirige des travaux pratiques en microbiologie, microscopie, biochimie et biologie moléculaire en 1re et en 3e années. Elle participe également au suivi des stages et des projets étudiants. Après une thèse à l’University College de Londres 5 ans de post-doctorat à l’Université de Kent puis à l’Institut Pasteur, elle mène en parallèle de ses recherches sur la mycologie appliquée aux plantes et à la santé humaine une activité d’enseignante, à laquelle elle a désormais décidé de se consacrer entièrement.
Pouvez-vous nous parler de la matière que vous enseignez ?
La biologie moléculaire est une science en plein développement, notamment dans les domaines de l’automatisation et des nanotechnologies. Les techniques de cristallographie et de modélisation des structures moléculaires évoluent elles-aussi. Il faut tenir compte de ces évolutions à la fois lors des cours théoriques, enrichis chaque année des dernières publications de la recherche, et aussi lors des expérimentations pratiques, en partie grâce à l’actualisation continue de nos laboratoires. En 4e année, mon rôle est d’apprendre aux étudiants, qui ont déjà acquis les connaissances nécessaires, une certaine logique scientifique. La physico-chimie des biomolécules est une discipline essentielle. En effet, physique, chimie et biologie sont au cœur des biotechnologies et interagissent entre elles de manière permanente. Par exemple, pour connaître la structure des molécules, il faut aussi connaître leur biologie.
Quelles méthodes utilisez-vous dans le cadre de votre enseignement ?
Je fais régulièrement faire aux étudiants des exposés sur les propriétés physico-chimiques de telle ou telle molécule. Je tente de leur montrer tout l’intérêt de ces études : par exemple, travailler sur les propriétés de l’anhydrase carbonique a permis de trouver des inhibiteurs spécifiques de cette molécule produite par certains micro-organismes pathogènes. Le développement actuel des deux laboratoires de Sup’Biotech permet d’aborder avec les étudiants les aspects les plus concrets des biotechnologies. Pour cela, je rattache ces aspects concrets à la réalité de ce qui se passe dans la nature. Par exemple, la plupart des laboratoires étudient des souches particulières d’un micro-organisme. Or différentes souches cohabitent dans le même environnement, formant de temps en temps des micro-biofilms possédant des caractéristiques bien spécifiques.
En parallèle de votre enseignement, vous suivez également quelques projets étudiants. De quoi s’agit-il exactement ?
La pédagogie par projets, à laquelle je participe en suivant certains groupes de travail, va également dans le sens d’un enseignement le plus concret possible. Ainsi, l’un des projets concerne la remise au goût du jour de l’hydromel, boisson alcoolisée à base de miel, consommée depuis l’antiquité. Les étudiants sont amenés à faire de la culture de levure, à ajouter des arômes dans le cadre d’expérimentations qui pourront avoir lieu en laboratoire. Mon objectif est de guider les expérimentations à partir des protocoles mis au point par les étudiants en fonction de l’impact de leurs expérimentations sur le goût ou l’aspect visuel de leur produit.
Et vous-même, êtes-vous porteuse d’un projet pour l’école ?
Un développement au sein de l’école qui me tient particulièrement à cœur est la mise en place d’un laboratoire de bio-production. La bio-production est un domaine en pleine expansion, utilisé par la pharmaceutique pour fabriquer de l’insuline, des antibiotiques, et d’autres molécules d’intérêt. Elle trouve également des applications dans l’environnement, par exemple avec les molécules synthétisées par des micro-algues que l’on cultive, les cultures de racines de tabac ou encore de levures… Il s’agit d’inculquer aux étudiants les techniques de bio-production et de leur faire produire des molécules d’intérêt général. Ce qui est particulièrement intéressant est que de telles techniques associent des niveaux différents : en amont, une étude biomoléculaire, ensuite la culture des cellules, et enfin la phase de purification des molécules.