De Sup’Biotech à Harvard
Eléanor Luce (Sup’Biotech promo 2011) a effectué son stage de fin d’études en R&D au Harvard Stem Cell Institute. Interview.
Après un baccalauréat scientifique, Eléanor Luce réalise un BTS biotechnologie à l’Ecole nationale de chimie, physique et biologie (ENCPB). En 2007, elle intègre Sup’Biotech en admission directe en 2e année. Ayant fait le choix de la majeure R&D, elle vient d’achever à la fin du mois d’août son stage de fin d’études au sein du Harvard Stem Cell Institute (HSCI), le laboratoire cellules souches d’Harvard.
Peux-tu présenter le laboratoire que tu as intégré ?
Le département iPS Core du HSCI travaille sur les cellules souches pluripotentes induites (iPS) – un domaine très prometteur, aussi bien pour la thérapie que pour la recherche fondamentale. Il s’agit de les générer à partir de cellules de patients, afin de développer des modèles de maladies comme Parkinson, Huntington, le syndrome de Down et bien d’autres.
L’équipe possède une grande banque de lignées qui sont ensuite distribuées dans différents laboratoires de recherche. Certains membres de l’équipe, comme la post-doc avec lequel j’ai travaillé, mènent des recherches sur le développement de nouvelles techniques d’obtention des cellules iPS.
Au sein du laboratoire, on sent clairement que les financements sont là. J’ai eu la chance de travailler avec du matériel de pointe, ainsi que des produits et kits qui coûtent une petite fortune. Le fait de rassembler tant d’équipes dans un même institut permet aussi énormément de collaborations, d’échange de matériel. On peut du coup développer des stratégies, mais surtout les tester, analyser les résultats et tenter une autre approche rapidement. C’est vraiment très agréable de travailler dans ces conditions.
Quel était ton rôle au sein du laboratoire?
J’ai travaillé sur deux projets en parallèle. Dans un premier temps je produisais des iPS à partir de cellules de peau, puis je faisais une série de tests afin de m’assurer de leur « qualité ». Dans ce projet, j’ai réalisé l’ensemble des étapes : la culture des cellules de peau, la production des virus, l’infection des cellules par ces virus, le repiquage des cellules iPS, ainsi que les différents tests de caractérisation (réactions en chaîne par polymérase pour l’étude de l’expression de certains gènes, immunocytochimie, etc.).
La deuxième partie de mon travail était davantage une activité de recherche. J’ai travaillé en collaboration avec une post-doctorante sur le développement d’un protocole pour obtenir des cellules iPS à partir de cellules sanguines, ce qui représenterait une grande avancée dans le domaine. Dans cette partie, j’ai également travaillé sur toutes les stratégies qu’on a pu développer, aussi bien au niveau des manipulations que sur les étapes de réflexion et d’analyses de nos résultats. Je ne me suis absolument pas sentie stagiaire, j’ai vraiment été impliquée à 200 % dans chacune des étapes.
Pour les aspects théoriques, j’ai utilisé certains cours que nous avons eus à Sup Biotech, et principalement celui de « Stem Cells and Development ». Ils m’ont permis d’avoir une vue d’ensemble du domaine. J’ai ensuite fait mes propres recherches : c’est un domaine en constante évolution. J’ai enfin utilisé certains projets que j’avais réalisés au cours de mon cursus. Pour les aspects techniques, je me suis principalement servi des connaissances acquises au cours de mes différents stages.
Comment se passe la vie dans un laboratoire d’Harvard ?
La vie dans un laboratoire d’Harvard, je la résumerais en un mot : « incroyable ». Le matin, en allant travailler, on peut croiser des groupes de touristes en visite sur le campus, des étudiants de l’université ou encore les chercheurs des laboratoires, de toutes les nationalités possibles. Un jour, le bureau des étudiants de l’université avait organisé toute une journée d’animations, on se serait cru dans un grand parc d’attraction… sauf que nous étions à Harvard !
Le nom est impressionnant, le campus l’est tout autant, mais aussi surprenant que cela puisse paraitre, malgré le nombre important d’employés et d’étudiants, les laboratoires ont su garder une dimension humaine. L’équipe dans laquelle j’ai travaillé était exceptionnelle, j’y ai rencontré des personnes avec lesquelles j’ai gardé de très bons contacts : plus que des collègues, ce sont devenus des amis.
La vie intellectuelle sur le campus est très dense. J’ai pu assister à énormément de conférences, comme celle de Marius Wernig, de l’école de médecine de Standford, qui présentait l’induction de neurones à partir de cellules non neuronales ; à celle de Craig T. Jordan de l’école de médecine de l’université de Rochester, qui exposait une technique de ciblage des cellules souches cancéreuses, ou encore celle de Laura Niklason, de l’université de Yale, sur une technique de régénération de poumon. J’ai aussi eu la chance d’assister à la 6e retraite annuelle du HSCI – une journée entière de conférences réservées aux membres du HSCI qui abordent de nombreux aspects des cellules souches, aussi bien à propos de leur dérivation qu’à propose de leur utilisation en thérapie. C’était vraiment très enrichissant.