BioSand : l’innovation béton « made in SupBiotech » pour rendre le bâtiment plus vert
Pour faire face à l’urgence du réchauffement climatique, toutes les innovations sont bonnes à prendre, en particulier si elles visent un secteur particulièrement polluant. C’est justement le cas de BioSand, un SupBiotech Innovation Project (SBIP) porté par une équipe de six étudiants de la promotion 2024 de l’école. Son objectif ? Rendre plus durable le monde du BTP en revalorisant les déchets bétonnés via une innovation bio-inspirée !
Incontournable dans la construction des bâtiments, le béton pourrait pourtant être considéré comme un véritable non-sens écologique tant il participe activement à ce qu’on appelle la pénurie du sable, un élément qui occupe une part importante de sa composition. Ainsi, 40 milliards de tonnes de sables sont extraites des fonds marins, des mines et des lacs chaque année pour le secteur du BTP, dont 400 millions de tonnes rien que pour la France, rendant la situation de plus en plus critique. C’est ce qu’ont découvert Rachelle Fontaine, Hugo Grandjean, Claire Langle, Clara Martinez, Mathilde Musetta et Margaux Pernicelli, lors de leur 2e année à SupBiotech au détour d’un documentaire édifiant.
Biotechnologies contre mafia du sable
« Le projet est directement lié à une prise de conscience, rembobine Claire Langle, coresponsable du pôle R&D au sein du projet. Alors que nous étions en train de chercher une idée de SBIP, nous sommes tombés sur un documentaire télévisé qui parlait justement de cette pénurie et révélait l’existence d’une véritable « mafia du sable » ! Nous avons alors découvert qu’il s’agissait d’un phénomène globalement méconnu alors que pourtant très grave… Cela nous a poussés à nous pencher sur l’une des industries les plus gourmandes en sable, en l’occurrence celle du BTP qui représente à peu près 90% de la consommation totale – le sable entrant dans la composition du verre et du béton. Or, comme on peut recycler le verre, mais que cela est beaucoup plus compliqué pour le béton, on a choisi de se lancer ce défi. »
Composée d’un pôle marketing, d’un pôle R&D et d’un pôle qualité & production, l’équipe développe donc une solution pour rendre le BTP « plus responsable » en s’intéressant directement au recyclage des déchets bétonnés. « Avec BioSand, nous visons une revalorisation de ces déchets bétonnés au travers d’une économie circulaire, en permettant la création de nouveaux bâtiments sans l’utilisation de nouvelles ressources naturelles, assure Clara Martinez, cheffe de projet et membre du pôle marketing. Le but est de réutiliser les déchets bétonnés produits par la destruction du bâtiment précédent. »
L’équipe de BioSand
Révolutionner le recyclage du béton
Aujourd’hui, seuls 40 à 60 % de ces déchets bétonnés sont revalorisés, ce qui représente une goutte d’eau dans l’océan ou plutôt un grain de sable dans le désert, d’autant plus que les méthodes actuelles de recyclage sont ironiquement loin d’être bonnes pour la planète. « Ces déchets sont traités principalement avec des techniques de concassage et de lavage assez polluantes car grandes consommatrices d’eau et d’énergie », détaille Clara. C’est là que se démarque BioSand. Reposant sur un procédé biotechnologique via une solution bio inspirée en micro-organismes, le projet de ces six futurs ingénieurs promet non seulement une réduction des coûts tout en se voulant à la fois plus vert et plus vertueux. En outre, la solution de BioSand cherche également à offrir une amélioration de la qualité de l’agrégat que l’on peut ensuite réincorporer dans le béton… et elle semble bien partie pour remporter son pari.
Des professionnels déjà intéressés par l’innovation de BioSand
En effet, l’équipe de BioSand réalise actuellement ses preuves de concept dans les laboratoires de SupBiotech. « Nous les avions divisées en trois parties et, à ce jour, le deux premières ont déjà été validées : l’innovation avance progressivement ! », se réjouit Clara. Un avis partagé par Hugo Grandjean, l’autre coresponsable du pôle R&D : « Cela va bientôt faire trois ans que l’on développe nos preuves de concept tout en travaillant sur les questions de production, de réglementation et de marketing. Nous avons eu la chance de contacter plusieurs entreprises et partenaires académiques qui se sont montrés inspirés par le projet et souhaitent nous accompagner pour la suite, au fur et à mesure du développement. »
Si les acteurs du secteur sont intéressés par les avancées de BioSand, ce n’est pas pour rien : « Pour le moment, nous n’avons pas trouvé d’autres entreprises apportant une valeur ajoutée comme la nôtre, note Hugo. Notre innovation se focalise sur un processus déjà observé dans la nature mais uniquement documenté au niveau environnemental : il n’a jamais été appliqué au niveau technique et encore moins sur un plan industriel ! »
Le défi du passage à l’échelle l’industrielle
Évidemment, les néo-ingénieurs de SupBiotech gardent encore des éléments confidentiels pour préserver l’avenir du projet. Ici, pas question de révéler le micro-organisme en question, même si les résultats menés en laboratoire sont plus que prometteurs. « Ça reste encore un petit peu secret pour l’instant, mais l’idée globale reste d’apporter une réelle valeur ajoutée au secteur du BTP et de la construction à travers des perspectives de chimiste et de biologiste que les entreprises n’ont peut-être pas à l’heure actuelle, souligne Claire. En effet, nous avons décelé de nouveaux mécanismes possibles de dégradation des déchets bétonnés. » Son homologue du pôle R&D va un peu plus loin : « La réaction liée au composé bioactif qu’on va utiliser est quasi immédiate. Toutefois, la production même du composé prend encore beaucoup de temps aujourd’hui : ce processus de production dure pour l’instant deux semaines même si l’on a réussi en laboratoire à le faire diminuer jusqu’à 4 jours. »
Le défi à venir pour BioSand sera logiquement de faire passer son innovation au niveau industriel et de s’appuyer sur des partenaires déjà établis. « On l’espère car on y croit, lance Clara, déterminée. BioSand est un projet qui nous tient à cœur et qui, selon nous, a une grande valeur scientifique : on pense qu’il peut réellement changer l’industrie de la construction. Donc oui, à terme, on souhaiterait pouvoir développer des partenariats avec des industriels de la construction ou des fournisseurs aptes à vouloir innover dans ce domaine. L’idéal serait de viser une mise en pratique directement sur les chantiers afin de construire les bâtiments de demain à partir du recyclage des déchets bétonnés issus du même site ! » Les prochains mois seront donc décisifs pour le futur de ce projet ambitieux. Loin d’être fermée à l’idée de se lancer dans l’entrepreneuriat ou l’intrapreneuriat, l’équipe a d’ailleurs conscience de ses atouts et se laisse le temps de la réflexion. « Tout dépend de comment nous allons évoluer et des opportunités qui se présenteront à nous, tempère la cheffe de projet. Nous sommes cependant certains que l’innovation de BioSand peut être une réelle réponse face à toutes les normes environnementales qui apparaissent de plus en plus dans le secteur du bâtiment ! »