Et si le cannabis soignait le monde ? Le défi passionnant de Naomi et Héloïse, deux ingénieures de SupBiotech !

Et si le cannabis soignait le monde ? Le défi passionnant de Naomi et Héloïse, deux ingénieures de SupBiotech ! - STH Biotech

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Héloïse Mailhac et Naomi Kaminsky, les deux ingénieures de SupBiotech à l’origine de l’entreprise STH BIOTECH


Organisé par Bpifrance (la banque publique d’investissement) pour détecter et soutenir les meilleurs projets de création d’entreprises de technologies innovantes, le concours i-Lab 2023 a, en juin dernier, décerné son Grand Prix à STH BIOTECH, la jeune entreprise de biotechnologie végétale fondée par Naomi Kaminsky et Héloïse Mailhac, deux ingénieures diplômées de SupBiotech (promo 2021) devenues CTO et CEO. Cette récompense prestigieuse n’est qu’une étape de plus pour cette aventure entrepreneuriale audacieuse initiée dans le cadre du programme SBIP de l’école et dont le pari consiste à produire des molécules rares à partir du cannabis pour donner naissance aux médicaments de demain. SupBiotech vous propose de rencontrer ces deux jeunes dirigeantes à l’ambition communicative.


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Comment résumer ce qu’est STH BIOTECH ?

Héloïse : STH BIOTECH, c’est une société qui développe des procédés de production de principes actifs pharmaceutiques à l’aide de la biotechnologie végétale. L’entreprise s’intéresse plus précisément aux composés à fort potentiel thérapeutique qui sont présents dans le cannabis afin de donner accès à de nouvelles molécules pour l’industrie pharmaceutique.

Naomi : Notre ambition est vraiment d’ouvrir un nouveau champ thérapeutique pour les industries pharmaceutiques en débloquant la production de molécules rares au sein de la plante de cannabis pour les médicaments de demain.

Héloïse : Nos clients sont les laboratoires pharmaceutiques. Ces derniers sont généralement déjà actifs dans la recherche sur les cannabinoïdes car ils ont identifié cette famille de molécules comme prometteuse dans des applications comme la douleur chronique, les maladies inflammatoires ou encore certaines maladies neurologiques. Or, pour ces applications, ils sont à la recherche de nouvelles molécules à tester comme potentiels traitements : c’est là que STH BIOTECH intervient ! Grâce à notre technologie, on sait comment modifier la plante pour lui faire produire les composés cibles qu’on va ensuite vendre. Cela permet à STH BIOTECH d’être à la fois fournisseur et apporteur de solutions !


Qu’est-ce qui vous a poussées à vous intéresser au cannabis ?

Héloïse : On s’est intéressées au cannabis d’abord pour son fort potentiel thérapeutique qui est justement largement sous-estimé et sous-exploité. En effet, seulement 2 % du potentiel moléculaire de cannabis est utilisé aujourd’hui. On a donc voulu creuser ce sillon et ainsi rendre accessible toute cette bibliothèque de composés à fort potentiel. L’autre raison qui nous a poussées à nous intéresser à cette plante, c’est l’époque en elle-même : quand nous avons débuté le projet, en 2020, il y avait une libéralisation, voire même une explosion du marché du cannabis, notamment en Amérique du Nord. Et comme le sujet commençait également à prendre en France, nous avons toutes les deux ressenti l’envie de travailler dessus à travers la bioproduction en mettant à profit nos compétences d’ingénieures en biotechnologies et notre expérience en matière de biotechnologie végétale. Très vite, nous avons constaté que les biotechnologies et la bioproduction en particulier permettaient de répondre à des points critiques de l’industrie actuelle du cannabis, à savoir la nécessité de produire à haut rendement et à bas coûts, mais aussi de manière durable et industrialisable tout en conservant de hauts standards de qualité.


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Une partie de l’équipe de STH BIOTECH


Entre l’amorce de votre SBIP de SupBiotech et aujourd’hui, trois années se sont écoulées. Qu’est-ce qui a changé sur ce laps de temps ?

Naomi : D’un point de vue personnel, je pense qu’on a énormément mûri et grandi : nous sommes passées d’un projet étudiant à une vraie entreprise que l’on porte. STH BIOTECH aujourd’hui compte désormais sept salariés, paye des charges, occupe des locaux de 50 m² avec des laboratoires professionnels aménagés, etc. Durant ces trois années, on a également dû chacune trouver notre place dans la société, se l’approprier et devenir complémentaires. Certes, nous sommes toutes les deux ingénieures en biotechnologies et amies, mais pour pouvoir gérer une société, il a fallu se répartir les rôles, puis renforcer l’équipe un an après la création de la société avec l’arrivée de Lucas Medjani, notre troisième associé, qui a renforcé notre duo avec ses compétences business.


Quelles ont été les grandes étapes de cette évolution ?

Héloïse : La première étape marquante a été de rejoindre le programme Shaker du Genopole d’Evry juste après les SBIP et SupBiotech. Le Shaker a incubé notre projet pendant un an et nous a octroyé une bourse, ce qui a financé les débuts notre R&D et permis de multiplier les expériences pour réaliser notre preuve de concept. Suite à ce gros premier jalon, il y a évidemment eu la création officielle de la société, c’est-à-dire l’enregistrement au registre du commerce, puis l’obtention de nos premiers financements. Là encore, le Genopole a été l’un de nos premiers soutiens à travers le programme d’accélération Gene.IO. Par la suite, nous avons vraiment essayé de faire levier avec d’autres dispositifs de financement comme des prêts d’honneur – notamment du Réseau Entreprendre – ou des subventions de Bpifrance. Par exemple, le dispositif Bourse French Tech Emergence a été un autre grand support financier pour nous.

Naomi : Pour moi, une autre grande étape de notre évolution concerne aussi nos locaux : nous sommes passés du laboratoire partagé par les projets du Shaker à celui de l’Open Lab partagé par des entreprises pour enfin finir par avoir nos locaux propres, dans la pépinière Genopole d’Evry, ce qui nous a permis de recruter du monde.

Héloïse : Impossible non plus de ne pas parler mars 2023, quand l’entreprise a été lauréate de Wilco, un programme d’accélération des startups en biotech qui fixe un objectif clair : permettre à la start-up d’obtenir le premier million de chiffre d’affaires en trois ans !

Naomi : Enfin, en juin dernier, il y a évidemment eu une autre grande étape, avec notre Grand Prix lors du concours national d’innovation i-Lab ! Nous sommes très fières de ce prix qui, en plus de représenter d’une certaine façon la concrétisation de nos trois ans de travail, va nous permettre de débuter un nouveau chapitre, de développer encore plus la société et de financer notre programme de R&D grâce à sa subvention d’un demi-million d’euros. Cette dernière sécurise une partie de nos besoins sur la partie non dilutive, soit le financement qui n’intervient pas dans la répartition du capital.

Héloïse : Et là, nous amorçons à présent la prochaine grande étape de notre histoire avec le lancement d’une levée de fonds d’un million d’euros auprès de nouveaux investisseurs privés. On espère pouvoir boucler cette levée d’ici la fin de l’année 2023 pour répondre à nos besoins de financement structurel jusqu’en 2025 et ainsi accélérer notre développement commercial !

Naomi : C’est le moment de nous rejoindre dans l’aventure !


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Le concours i-Lab a distingué STH BIOTECH pour son programme BIOCAP. En quoi consiste ce dernier ?

Naomi : « BIOCAP » signifie « BIOproduction de CAnnabinoïdes par une Plateforme in vitro » : ce programme consiste à développer et produire nos premiers lots commerciaux de cannabinoïdes rares, soit une partie des molécules de la plante de cannabis. Pour établir ce programme, nous avons d’abord passé des étapes technologiques nous ayant permis de confirmer certaines de nos hypothèses. À présent, notre but est de développer deux premières lignées cellulaires végétales pour ces cannabinoïdes rares et de monter le procédé jusqu’à 50 litres. Globalement, il s’agit de mettre en œuvre des preuves de concept commerciales afin de pouvoir délivrer nos produits sur le marché. Enfin, ce programme comporte aussi un volet plus opérationnel : c’est un projet à un million d’euros sur 2 ans qui va générer plus de cinq embauches à poste fixe !


Est-ce que les acteurs du monde pharmaceutique suivent l’évolution de STH BIOTECH ? L’entreprise est-elle déjà en contact avec eux ?

Héloïse : Absolument ! On a des contacts – encore confidentiels – avec certains laboratoires pharmaceutiques travaillant sur les cannabinoïdes et qui cherchent déjà à sécuriser les premières molécules que l’on pourrait produire avec notre plateforme, notamment pour des applications liées au cancer. Il y a également d’autres pistes dans le secteur dermocosmétique pour des applications liées à l’inflammation de la peau, via de grands groupes industriels français et suisses, autour de la valorisation de certaines molécules un peu différentes de celles qu’on a déjà réussies à produire avec notre plateforme sans passer par un très long temps de développement !


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Cancer, inflammations de la peau, douleurs… Le cannabis semble avoir un champ d’application potentiellement très large, non ?

Naomi : C’est vrai ! Pour retracer un peu leur histoire, les cannabinoïdes ont été découverts en 1960 et, très vite, la communauté scientifique s’est rendue compte que ces molécules se liaient très bien à des récepteurs déjà produits naturellement par le corps humain, présents pour interagir avec des cannabinoïdes endogènes ! Les cannabinoïdes de la plante de cannabis peuvent ainsi « mimer » les effets des endocannabinoïdes en se liant au récepteur du corps humain. Les chercheurs ont également découvert que notre système endocannabinoïde était impliqué dans l’équilibre du corps humain en général et que, par conséquent, un déséquilibre de ce système entraînait l’apparition de troubles et de maladies : troubles de l’appétit, obésité, problèmes au niveau du système nerveux avec des douleurs chroniques, déclenchement de maladies neurodégénératives, troubles du sommeil et de l’humeur, anxiété, dépression, etc. Ce champ de molécules semble donc inépuisable, d’autant qu’il reste encore énormément de choses à découvrir et de molécules à étudier. Notre ambition, c’est de pouvoir débloquer la recherche sur ces molécules et qu’on puisse en faire des médicaments prometteurs.


Est-ce que vous avez des concurrents ?

Héloïse : Bien entendu. Il faut savoir qu’avant de se tourner vers l’application médicale, le marché du cannabis a d’abord été un marché à applications récréatives. La récente libéralisation aux États-Unis a ainsi fait émerger beaucoup d’acteurs et notamment des agriculteurs et cultivateurs de cannabis sous serres. Nos principaux concurrents à l’heure actuelle sont ces gens-là, qui cultivent des hectares de serres ou de champs pour produire seulement quelques cannabinoïdes et pour qui il est très difficile de produire les plus rares. D’où la valeur ajoutée de notre technologie ! Evidemment, il existe aussi d’autres concurrences en Amérique du Nord et même en Europe, qui travaillent sur des méthodes de production synthétique via la chimie organique ou la fermentation de micro-organismes, mais ces méthodes concernent généralement des molécules végétales complexes qui sont très chères à mettre en place et n’atteignent pas encore de très bons rendements.

Naomi : Concernant la chimie organique et donc la synthèse de molécules complexes, on peut également préciser qu’il s’agit d’une méthode très polluante, avec un impact environnemental énorme ! C’est pour cette raison que de nombreuses sociétés de chimie ont été interdites en Europe et délocalisent leur production en Asie notamment, tellement l’impact environnemental est énorme.


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STH BIOTECH lors de la remise du Grand Prix du concours i-Lab 2023



La raison d’être de SupBiotech est justement de former des ingénieurs conscients de l’impact des biotechnologies sur l’environnement comme la société. Pour vous, cette dimension environnementale est également primordiale ?

Naomi : Exactement. Elle a même été une caractéristique que nous avons dès le départ absolument voulue prendre en compte dans la construction de notre technologie. Cette dernière étant une technologie de culture de plantes in vitro, elle n’utilise pas de lumière, ne prend pas beaucoup de place et utilise uniquement l’eau du milieu de culture. Certes, il faut des laboratoires pour installer une unité de bioréacteur de 4 m², mais c’est sans précédent avec la culture en serre. On pourrait ainsi économiser 1 000 fois plus d’eau et d’énergie, pour une surface d’exploitation près de 10 000 fois moins importante ! Notre technologie ne nécessite pas non plus de substrat pétro sourcé et ne produit donc aucun déchet nocif pour l’environnement.


Regardons un peu dans le passé. Quel est le moment le plus marquant à vos yeux quand vous regardez le chemin parcouru ?

Héloïse : Honnêtement, le moment qui détrône tous les autres pour moi, c’est l’i-Lab ! C’est tout de même un concours très prestigieux, sélectif et disputé, qui représente quatre mois d’expertises et l’implication de dizaines de personnes dans le processus pour moins de 2 % de potentiel de réussite chez les participants… et nous, en plus de faire partie des lauréats, nous avons aussi obtenu une mention spéciale du jury avec le statut de Grand Prix ! Cette reconnaissance est particulièrement importante pour nous car elle témoigne, pour la première fois en France, d’un intérêt réel et concret pour développer la recherche sur le cannabis, à l’échelle de l’État !

Naomi : Je partage l’avis d’Héloïse même si je suis également attachée à d’autres moments, comme lorsqu’on a partagé une coupe de champagne après avoir créé la société, embauché notre première salariée ou, dernièrement, emménagé dans nos propres laboratoires. J’aime ces instants qui symbolisent chaque nouvelle étape franchie !


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L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, à consommer avec modération


Et regardons maintenant vers le futur. Jusqu’où vous projetez-vous ?

Héloïse : Mon rôle est justement de discuter avec des investisseurs et de mettre en avant notre ambition ! Aujourd’hui, on arrive à se projeter jusqu’à l’horizon 2030, avec l’envie de devenir partenaire de référence des laboratoires pharmaceutiques pour la recherche sur le cannabis : on veut devenir un fournisseur fiable avec de belles réussites technologiques tout en étant implanté structurellement en France, pour faire plusieurs millions de chiffre d’affaires. Au-delà de cet objectif à court terme, le futur reste encore à écrire. À l’avenir, on peut très bien continuer à grandir en tant qu’entreprise pour devenir une grosse PME, mais on peut aussi éventuellement rejoindre un grand groupe pour poursuivre cette activité en interne.


Enfin, quelle leçon avez-vous retenu de ces trois dernières années ?

Héloïse : L’audace, ça paye ! C’est ce qu’on se dit depuis le début de l’aventure et c’est aussi comme ça qu’on nous qualifie souvent, d’audacieuses, parce qu’on a décidé de s’attaquer à une technologie innovante comme la bioproduction végétale et, surtout, au cannabis. Certes, on a pu gagner beaucoup de prix et de la reconnaissance, mais le chemin est encore long. On doit continuer à faire face à beaucoup de freins pour combattre la vision qu’ont les gens de cette plante qui, dans l’esprit du plus grand nombre, reste très liée à la drogue récréative. Outre ces freins plutôt psychologiques, il faut aussi faire face à des freins bancaires ou liés à la propriété intellectuelle car le cannabis peut parfois faire l’objet d’un rejet quasi systématique… Toutefois, cela ne nous effraie pas : on aime à se dire que les gagnants de l’histoire sont nos partenaires qui ont bien voulu nous accompagner depuis le début – y compris même avant la création de la société – et nous-mêmes ! On espère d’ailleurs que le Grand Prix de l’i-Lab nous permettra aussi de faire prendre conscience de l’intérêt du sujet à encore plus de monde !

Naomi : Il y a l’audace qui paye… mais aussi le travail ! Chez ces deux étudiantes qui sortaient à peine de SupBiotech, il y avait certes un peu de naïveté mais surtout l’envie d’entreprendre : ces trois dernières années, on a accompli un travail acharné et c’est ce qui nous a permis de réussir à embarquer d’autres personnes avec nous dans cette aventure. Il faut ne pas avoir peur de se donner à fond : c’est un vrai état d’esprit. L’entrepreneuriat, c’est comme des montagnes russes, avec des hauts et des bas, mais travailler sans jamais rien lâcher vous récompensera toujours. Peut-être pas tout de suite, mais vous en récolterez les fruits plus tard, soyez-en sûrs !


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